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Harry Bosch à Hong Kong

04/06/2011

Le Connelly nouveau est arrivé, comme chaque année ou presque. Autant attendu que le Beaujolais et malheureusement aussi décevant, sans vouloir faire de comparaison facile. Peut-être y place-t-on trop d’espoir ou alors je suis simplement devenue difficile? En tout cas, il semblerait que je ne sois pas la seule vu les commentaires lus sur ce blog.

C’est le retour de Harry Bosch. Il est envoyé sur une affaire de meurtre dans une boutique de vin tenue par des immigrants chinois. Simple vol ayant mal tourné? Il commence à en douter lorsqu’il reçoit une vidéo montrant sa fille de treize ans attachée et bâillonnée. Celle-ci vit à Hong Kong avec sa mère et elle a disparu depuis la veille. Bosch a-t-il dérangé les triades? Il part immédiatement pour la sauver.

Michael Connelly arrive comme toujours à happer son lecteur dans un thriller particulièrement efficace. On suit, tenus en haleine, Bosch à la recherche de sa fille dans Hong-Kong, gérant en même temps la situation à Los Angeles. Cela se lit d’une traite et c’est très agréable.

Et pourtant, cela ne suffit pas, car ce n’est certainement pas à la hauteur d’autres romans que nous a offerts Michael Connelly. La lassitude nous prend. Il y a un air de déjà vu, déjà lu.

La question du lieu entre en jeu également. Comme beaucoup d’auteurs, Connelly avait installé une ville autour de son héros, en faisant presque un personnage à part entière. En déracinant Bosch à Hong Kong, il nous apporte un exotisme, c’est vrai, mais pas un qu’on avait désiré. Trop de détails m’ont parfois donné l’impression de faire une visite guidée sans que cela soit le propos.

La véritable déception a été le personnage de Bosch lui-même. En plaçant sa fille au cœur de l’intrigue, en la mettant en danger, Connelly aurait dû le rendre plus humain et faillible. Pourtant, à mon avis, il réussit seulement à le faire paraître moins crédible. Tout au long du récit, on oscille entre de l’émotion à la limite du sentimentalisme avec la douleur d’un père qui ne voit pas assez son enfant et une froideur intense lors d’évènements qui devraient être traumatisants ou du moins ralentir l’action. Cela donne l’image d’un héros digne d’un film hollywoodien pas très bon: Moi, fort, moi, homme très efficace, mais avec un cœur tendre parfois. Je caricature un peu, mais pas tant que ça.

Si on rajoute à cela, une intrigue cousue de fil blanc, pour ne pas dire du câble d’amarrage, tellement c’est gros, cela devient très décevant. Bosch arrive à se retrouver dans Hong-Kong avec une simple photo mise à l’envers et sans se tromper, comprend tout ou presque, le tout en trois jours.

J’ai l’air de ne pas avoir aimé du tout, mais cela n’est pas ça. Il y a bien sûr des polars beaucoup moins bien écrits avec des intrigues sans queue ni tête, des histoires d’amour inutiles et de la violence gratuite. Il s’en publie à la pelle, j’en suis bien consciente, j’en vends énormément et je suis même obligée d’en lire quelques-uns. Les Neuf dragons n’en fait pas partie, l’écriture est à la hauteur, offrant une lecture divertissante et agréable. Sauf qu’il y a des auteurs dont on espère plus et qui nous ont habitués à beaucoup mieux; c’est le cas de Michael Connelly. J’ai beau savoir que ce n’est pas le premier titre de lui qui me déçoit, je me dis toujours qu’il va se rattraper la prochaine fois. Il semblerait qu’il se soit endormi sur ses lauriers, mais j’attends encore, l’espoir fait vivre.

Michael Connelly, Les Neuf dragons, Seuil, 2011 (Nine Dragons, 2009) traduit de l’anglais (États-Unis) par Robert Pépin.

Pour une fois que je suis d’accord avec René Homier-Roy sur un livre, il faut que je le signale, c’était sa critique sur Radio-Canada (merci Janmi pour le lien).